Par Panos Kosmas* |
07-01-2015
*Membre du Comité Central de SYRIZA et de la direction de DEA. Article
tiré du n°327 du journal de DEA « Gauche Ouvrière »
Face à une bataille
décisive décrite dans SYRIZA, toutes tendances confondues, par des termes tels
que « guerre » ou « affrontement », la révision de…
l’arsenal du parti lors des travaux du CC et du congrès permanent qui a suivi,
présente des aspects positifs mais aussi de nombreux points noirs.
Les aspects positifs
tiennent dans la confirmation des engagements programmatiques fondamentaux, sur
quatre points essentiels (en dépit des « arrondissements d’angles »
du discours de Tsipras) : Premièrement, l’abolition du mémorandum n’a rien
à voir avec la négociation avec les créanciers, elle est le « droit du
peuple grec ». Deuxièmement, la réalisation des engagements de la Foire
Internationale de Thessalonique interviendra immédiatement et n’est pas non
plus liée à la négociation avec les créanciers. Troisièmement, fin de la Troïka
et des mémorandums sans prolongation du régime mémorandaire. Quatrièmement, la
négociation avec les créanciers ne concerne que la dette et l’accord de prêt,
l’objectif étant l’annulation de la plus grande partie de la dette.
Mais au-delà, le
bilan n’est absolument pas encourageant…
1. Démocratie dans le parti : Le CC a été convoqué après plus
de trois mois, il n’était donc pas « moins une », mais « plus
une ». Au-delà du point de cristallisation majeur qu’est la constitution
des listes (où la direction centrale a poussé par tous les moyens au
renversement des décisions de congrès), la question du bouleversement du
programme de SYRIZA sur des points centraux a été posée. Bien que – parait-il –
depuis deux ans des centaines de cadres s’occupent de la formation du programme
gouvernemental et bien que le plan qui en découle devait être présenté au CC et
discuté depuis le 10 novembre, nous avons eu droit à une « soupe »
bâclée de 130 pages, pour finalement aboutir aux points qu’A. Tsipras a
présenté dans son discours. Le congrès permanent lui-même a été annoncé sans
que le CC le décide (contrairement aux statuts), ni même le Bureau Politique du
parti. Et tandis qu’A. Tsipras poussait et parvenait à éviter un vote du CC,
afin de faire du congrès permanent une manifestation festive d’ouverture de la
lutte électorale, tard dans la soirée du samedi la direction centrale imposait
de facto la tenue d’un vote indicatif pour l’adoption…du programme de
gouvernement.
Ces pratiques, non
seulement portent atteinte à toute idée de démocratie dans le parti, non
seulement elles humilient et rabaissent des cadres du parti qui malgré la neige
étaient descendus de toute la Grèce à Athènes pour se trouver confrontés à
cette procédure douteuse, mais elles révèlent l’imposition de pratiques renvoyant
à la période de dégénérescence social-libérale du PASOK en machine électorale
caporaliste.
2. Alliances : Le grand fait positif de la dispute interne sur
cette question est que le danger d’intégration sur les listes de SYRIZA
d’éléments dirigeants de DIMAR, groupe qui constitue un maillon important du
centre gauche social-libéral, a été tenu
en échec. Mais dans le même temps, ont été imposés les choix de la direction
centrale concernant l’ouverture aux cadres de différents « cercles »
du PASOK (Accord Social de Louka Katseli, Voudouris – Parastatidis, mais aussi
Tzakri) (1),
ainsi que des cadres du centre-droit (Makri, Giatagana) (2).
3. Programme : En-dehors des aspects positifs évoqués plus
haut, il y eut d’importantes modifications ou omissions. Sur les banques
notamment, la position du discours de Tsipras révèle une profonde
modification : « Nous protégeons le système bancaire dans le cadre de
la BCE et garantissons les dépôts des citoyens grecs ». Quant aux
privatisations et à la reconstruction (socialisation) des entreprises et
organismes publics, il n’en a pas été fait une seule fois mention !
C’est dans ces
conditions que nous marchons vers la grande aventure politique des élections,
de la très probable victoire électorale et du gouvernement de SYRIZA avec une
« balance » incertaine entre le danger et l’opportunité. Une
« balance » qui sera
déterminée dans la lutte elle-même, par les forces vives politiques et sociales
qui lui donneront en conscience son caractère décisif. Au cours de la marche
aux élections, et au-delà de celles-ci.
PS : Il a été révélé que le slogan « L’avenir a
commencé » (qui trônait sur la banderole centrale du congrès permanent)
est un plagiat du spot électoral du PASOK aux élections de 2000, qui avait
Simitis(3)
pour acteur principal. La portée politique et symbolique de ce choix n’est
certainement pas sans importance de la part de certains.
(1) Louka Katseli : ancienne députée et ministre PASOK sous le
premier gouvernement mémorandaire de G. Papandreou, exclue de son parti en 2011
pour avoir refusé de voter le second mémorandum. Odysseas Voudouris : député PASOK proche de G. Papandreou,
fervent défenseur du premier mémorandum, il vote contre le second mémorandum,
est exclu du PASOK et rejoint DIMAR en 2012. Theodoros Parastatidis : élu député PASOK en 2009, réélu en
2012, vote le premier mémorandum puis s’oppose aux deux suivants et est exclu
du groupe parlementaire du PASOK. Theodora
Tzakri : Députée de longue date et ancienne ministre PASOK, elle vote
la motion de censure proposée par SYRIZA contre le gouvernement Samaras en
novembre 2013 et est exclue du groupe parlementaire du PASOK.
(2) Rachel Makri : député des Grecs Indépendants (ANEL, souverainiste
de droite), exclue en octobre 2014. Chrysoula
Giatagana : députée ANEL, démissionne du groupe parlementaire en mai
2014.
L’ensemble des
députés cités sont candidats pour SYRIZA en janvier 2015.
(3) Kostas Simitis, dirigeant du PASOK et premier ministre de 1996 à
2004, principal artisan de l’adaptation de la Grèce aux critères de Maastricht
et de l’euro.