Cet article de Sotiris Martalis (dirigeant de DEA) est paru sur le site du Réseau Rouge de SYRIZA.
Sotiris Martalis
05-12-1013
Le congrès du Parti de la Gauche Européenne (PGE) dans quelques
semaines à Madrid et les prochaines élections européennes (Mai 2014) vont
alimenter le débat sur l’Europe au sein de la gauche.
Cette discussion est
de toute façon importante. La commission et les autres organes de direction
européens se sont révélés être le Directoire de l’implacable offensive de
classe du capital contre les droits ouvriers et sociaux à l’échelle européenne.
Non par hasard, dans tous les pays membres la haine ouvrière et populaire
contre « la bureaucratie de Bruxelles » augmente.
Eurocentrisme
L’enfermement de la
gauche dans une politique euro-centrée aveugle a pour conséquence de laisser le
champ libre à l’ « euroscepticisme » des partis de droite ou,
pire, au nationalisme économique et au protectionnisme des partis d’extrême-droite.
La décision du PGE de
faire d’A. Tsipras le porte-parole de sa campagne des élections européennes
ajoute un poids supplémentaire à cette discussion. Chaque élément des décisions
du PGE sera partie intégrante de la bataille politique en Grèce entre,
principalement, la ND et SYRIZA.
Les orientations
jusqu’ici connues du PGE tournent autour de l’idée centrale d’une « refondation »
de l’UE. Quelques réformes sont proposées (« une autre architecture »),
alléguant qu’elles apporteront un changement soi-disant essentiel au
fonctionnement de l’UE, dans le sens des intérêts populaires. Ces réformes constituent
dans une large mesure la continuité de la stratégie social-démocrate de
mutation de l’UE (idées Delors), vieille de 20 ans : augmentation du
budget, « transferts » financiers, communautarisation des dettes,
programmes augmentés d’investissements publics, « démocratisation »
de la Banque Centrale Européenne, ect.
Personne cependant
dans le PGE ne se donne la peine d’expliquer pourquoi y compris les « pères »
de cette politique (par exemple le PS français) l’ont aujourd’hui abandonnée. Le
cœur de la réponse réside dans le constat que dans les circonstances de la
crise et à l’apogée de l’attaque néolibérale, aucune fraction significative des
classes dirigeantes ne pense sérieusement adopter un programme « keynésien ».
Choix dominant
Le « merkelisme »
n’est pas une excentricité du personnel politique gouvernemental : c’est
un choix des banques et des industriels de toute l’Europe. Par conséquent toute
politique sincère aspirant à des « réformes » pro-ouvrières et
pro-populaires dans l’UE est condamnée par la réalité à assumer les tâches liées
à la rupture complète et au renversement du système à l’échelle européenne.
Cette réalité se
traduit dans trois directions : 1) le renversement du système au niveau
national, 2) la politique internationaliste, 3) la stratégie socialiste, comme « guide »
pour les renversements du système au plan national comme européen.
L’éloignement du PGE
par rapport à ces problématiques prépare le terrain au retour des ses partis et
de ses membres à une politique de centre-gauche. On le voit en France, avec la
décision du PCF de relancer la gauche « plurielle », via les accords de
coalition avec les socialistes de Hollande pour les élections municipales. On l’a
vu en Italie avec le « voyage » liquidateur de Refondation Communiste
dans des alliances électorales successives de soumission au centre-gauche. On
le voit déjà au Portugal avec le recentrage conservateur du Bloc.
SYRIZA doit trouver
la force d’éviter ce piège. Ce qui ne sera pas fait par des demi-mesures telles
que la proposition de « refondation de gauche de l’UE ». Ces
propositions viennent compléter la politique du PGE (programme de
développements régionaux, soutien aux programmes coopératifs-autogestionnaires,
accent mis sur la revendication démocratique), sans pour autant changer son
caractère d’impasse. Car la question centrale demeure : quel rapport de
force politique et de classe peut imposer au capital – à l’échelle européenne –
ces changements ? Et, si la gauche rassemble les forces nécessaires à une
telle confrontation, pourquoi s’autolimiterait-elle à une politique keynésienne
social-démocrate ?
Basculements
Comme le disait la
déclaration initiale de SYRIZA, nous devons nous affronter à l’UE comme champ de
lutte de classe, exactement comme le pays dans lequel nous vivons. Où nos
tâches ne consistent plus en des revendications de « réformes » pour « une
autre politique », mais dans des basculements politiques et sociaux
profonds en direction d’une émancipation socialiste globale. Seule une telle
politique de classe et internationaliste peut constituer une solution alternative
tant au pourrissement de l’européisme réellement existant, qu’au retour du
nationalisme économique, politique et militaire.