jeudi 7 février 2013

Brochure du réseau de soutien aux immigrés Diktyo



Les immigrés sont les damnés de la Terre, grecs et étrangers, travailleurs unis

Au moment le plus critique de l’histoire d’après-guerre, où l’ouragan des mémorandums écrase les travailleurs et détruit leurs droits collectifs, dans une époque où la crise économique plonge la société dans un phénomène de barbarie et d’anthropophagie, nous continuerons, comme nous l’avons fait jusqu’ici, à prendre la défense des parias hier de la « croissance » et aujourd’hui de la crise, des immigrés, sans silences embarrassés, sans culpabilité et sans ambiguïté, sans rien attendre en retour, refusant de négocier nos valeurs sur le terrain vulgaire et confortable de leurs ennemis.


Parce que c’est juste !

Contre l’hystérie anti-immigrée
La politique d’attaques contre les immigrés des ces quatre dernières années, avec pour sommet l’année en cours, a eu des conséquences dramatiques pour les immigrés, excluant et plongeant dans la misère les couches les plus fragiles ou vulnérables, marginalisant une grande partie de ceux qui avaient déjà intégré la réalité grecque et plongeant insensiblement tout le monde dans la peur et l’insécurité. Les règles de cohabitation qu’ils avaient conquis ont été parallèlement frappées de façon violente et brutale, des valeurs stables et des certitudes se sont effondrées, influençant de façon catastrophique et dangereuse les processus de formation des consciences sociales.
                                                                                                                                   
Les concepts de réfugié et de migrant, de refuge politique et économique, se sont complexifiés et la distinction est devenue difficile, mais aussi souvent injuste et inhumaine.

L’immigration de travail est devenue une immigration de refuge, d’individuelle elle est devenue familiale, des couches moyennes elle a gagné les plus pauvres et non qualifiées, les mécanismes locaux d’inclusion et d’assimilation ont reculé face à de très résistants réseaux de passeurs et d’exploiteurs, les législations prohibitives et les pratiques répressives ont rendu l’action encore plus difficile et ont en particulier encore plus exposés les individus à la violence et à l’exploitation.

Même si la guerre des chiffres brouille les cartes et empêche une estimation fiable des ordres de grandeur, chacun peut voir que l’image d’accroissement de l’immigration est en partie réelle, comme résultat de la mondialisation de la pauvreté, des guerres, de la rapidité de l’information et des circuits de haute spéculation, et en partie fictive, conséquence de l’accumulation passagère d’hommes enfermés, de leur marginalisation et de la rhétorique d’extrême-droite qui exploite et gonfle le phénomène.

Du reste, l’entreprise de Xenios Zeus n’a pas donné raison à la politique du chiffre, puisque pas même un immigré interpellé sur 13  n’a été trouvé sans papiers (de façon significative, sur les 57 000 personnes contrôlées jusqu’au 12/12/12, environ 4000 étaient sans papiers et encore moins ont atteint les camps de rétention).

Les responsables traitent leurs victimes d’ « envahisseurs »

Tandis que l’Europe-forteresse renforce ses murailles et augmente le niveau de ses exigences envers les pays de la périphérie, imposant la « libysation » de la Grèce, les réfugiés – migrants se trouvent enfermés dans le pays, et les quartiers de la ville dégradés depuis des années, dédiés à une immigration intérieure pauvre dans les années 1960-70, se remplissent aujourd’hui de ces prisonniers. Les problèmes de pauvreté et de dégradation qui existaient déjà s’exacerbent et se mettent en place des cercles vicieux d’appauvrissement généralisé.

La barbarie d’extrême droite et le fascisme dans l’Etat

Et par conséquent la brutalité planifiée des diversions politiques, combinée à la propagande d’extrême droite agit dramatiquement, cultivant et renforçant des idéologies de haine, discriminatoires et ségrégationnistes, minant la cohésion sociale. Le terme « migrants illégaux », dans toute sa charge négative, est entré avec succès dans le vocabulaire quotidien, le « permis de séjour », les expulsions, les centres de rétention sont intégrés dans la conscience de larges secteurs de la société. Le corps social est poussé à s’accoutumer à la violence envers les immigrés, à ne pas s’opposer aux irruptions armées dans les autobus et les domiciles, à vivre à côté d’un camp de concentration, avec des centaines de personnes accrochés aux fils de fer barbelés, à accepter la violence, la répression brutale, les agressions racistes et dégradantes, sans s’en inquiéter ni en avoir honte. Les troupes armées des forces spéciales et les bandes armées de gros bras casqués en blousons noirs tentent de transformer les quartiers déqualifiés des villes en terrain de démonstration de la barbarie néofasciste, afin que les passants se taisent et que les victimes de la violence ne reçoivent jamais justice. Les politiques d’intimidation sont devenues des outils de gestion de la subordination et de la soumission de la société.

Nous refusons de capituler sur ce que nous avons toujours défendu

Nous refusons d’accepter qu’il y ait des « individus clandestins » ou des « vies clandestines », car nous ne négocions pas la valeur de l’Homme.

Nous refusons d’admettre que le droit au travail, à la santé, à la liberté, à la vie dépendent d’une autorisation administrative, d’une invention dédiée au contrôle des vies humaines, le « permis de séjour ».

Nous refusons d’admettre que la sécurité et la cohésion sociale soient assurées par la violence, les camps de concentration et les expulsions massives, car elles produisent la haine et le racisme, et on ne peut construire une société avec ces ingrédients.

Nous refusons d’accepter les camps de concentration, où on entasse des personnes sans condamnation pénale, sans nourriture suffisante, sans hygiène, coupés des structures de solidarité, sans issue, pour qu’ils retournent dans la société six à douze mois après, encore plus marginalisés qu’ils ne l’étaient auparavant.

Nous refusons d’accepter que les enfants des immigrés doivent subir le même que leurs parents, immigrés eux aussi, prisonniers des permis de séjour, des timbres [récépissés, attestations], de l’exploitation patronale, de l’arbitraire policier, exclus de l’enseignement supérieur, de la santé, de la culture, des droits élémentaires de chaque jeune.

Nous refusons la mise en accusation collective dont font l’objet les immigrés concernant la criminalité générée par la crise économique et sociale, leur condamnation à la clandestinité et leur prise en otage par les clans politiques, à l’extérieur comme à l’intérieur de la Grèce.

Nous refusons la mise sur un pied d’égalité de la délinquance des pauvres avec la violence organisée des puissants et la violence des fascistes.

Nous refusons d’admettre la division de la classe ouvrière sur la base de l’origine ethnique de ceux qui la constituent, car nous maintenons que ce qui unit « ceux d’en bas » est leur place dans la production, que ceux qui font l’objet de l’exploitation et de l’oppression ont des intérêts communs.

Dans le monde des patrons nous sommes tous étrangers

Le phénomène de l’immigration avec ses caractéristiques actuelles est une conséquence de la mondialisation, de la pauvreté et des inégalités. La guerre contre les immigrés est une guerre contre les pauvres, contre la fraction la plus exclue et la plus marginalisée de notre société, ce que nous vivons de la façon la plus claire avec la violente offensive du capital et les inégalités de richesses.

Dans cette guerre, nous sommes moralement, idéologiquement et politiquement du côté des  migrants, car nous sommes du côté des pauvres. Car nous luttons pour l’unité des travailleurs, pour le développement de la solidarité internationale et de classe.

La défense des migrants est une défense de notre propre société, car les immigré-e-s en sont une composante, car pour nous chaque personne qui se trouve ici fait partie de notre société, sans qu’il ait besoin d’autorisation administrative pour cela.

C’est la défense du monde du travail, car les immigrés sont une partie du monde du travail, la plus exploitée et la plus opprimée.

C’est la défense de la justice sociale, de l’égalité et de la liberté contre le système de la ségrégation, de la discrimination, de la criminalisation et de l’exploitation.

C’est la lutte contre les politiques de haine qui cherchent à ériger une société d’enfermement, méfiante et hostile, cannibale et délatrice.

C’est pourquoi nous luttons pour :

La régularisation de tous les immigré-e-s qui se trouvent dans le pays, pour qu’ils sortent de cette situation floue et deviennent porteurs de droits et devoirs, dans l’intérêt de toute la société.

La dépénalisation de l’immigration car le droit à la vie ne peut être un crime.

L’asile pour les réfugiés des violences de guerre, de la pauvreté, de la mondialisation, des crises sociales et des catastrophes environnementales.

L’abolition des règles de Dublin II et retrait de l’Accord Européen sur l’Asile et l’Immigration.

L’assurance des processus de déplacement des réfugiés – immigrés vers leurs pays de destination pour que l’Europe en assume les coûts sur une planète qui gémit des guerres, de l’exploitation et de la misère.

La dissociation du droit de séjour des exigences étouffantes et des pré-requis inaccessibles et incompatibles avec les circonstances de la crise (timbre, contrat de travail, etc…) pour éviter la dé-régularisation de personnes qui ont déjà intégré la réalité grecque.

L’égalité d’accès aux droits à la santé, à l’éducation, au logement, au travail, pour que cesse le pouvoir des réseaux d’exploitation.

Une éducation antifasciste dans les écoles, des actions antifascistes dans les hôpitaux, les usines, les quartiers pour que les serpents du nazisme ne grandissent, la création d’initiatives antifascistes et de structures visibles de solidarité sociale partout, afin d’enrayer la démagogie et la terreur fasciste.

La condamnation des coupables d’incitations et de tentatives de violences racistes, ainsi que la protection des victimes, pour que s’arrête l’horreur des raids fascistes.

Parce que nous ne voulons pas d’une société de tolérance, mais une société de solidarité, de participation égale et de droits égaux.

Parce que seule la participation et la solidarité peuvent construire des sociétés cohérentes, et qu’elles sont le seul bouclier de protection contre toutes les formes de barbarie et de crime.

Parce que nous luttons pour notre dignité à tous.

Parce que c’est juste !

Diktyo - Réseau de Soutien Social aux Réfugiés et Immigrés.
http://diktio.org/